Apollon, le dieu-papillon de nos montagnes ensoleillées.

Parnassius apollo, Pyrénées (photo Ugo)
Parnassius apollo, Pyrénées (photo Ugo)

C’est bien souvent d’un battement d’aile vigoureux et d’un vol presque lourd que l’Apollon se manifeste à nos yeux dans les prairies sèches des montagnes de l’Eurasie. Grand papillon blanc ou crème plus ou moins grisonnant et présentant de sublimes ocelles rouges ou oranges bordées de noir sur ses ailes postérieures, cet insecte incarne avec magnificence la poésie de la nature, la beauté de la vie et la magie du soleil. Ce n’est effectivement pas un hasard si le célèbre naturaliste Linné le décrit en 1758 dans son ouvrage de classification du règne animal sous le nom de Papilio apollo. Le papillon est alors comparé à Apollon, dieu grec des arts, des muses et de la lumière. Plus tard, l’entomologiste français Pierre-André Latreille donnera naissance au genre Parnassius en référence au Mont Parnasse qui se situe dans le centre de la Grèce, en Phocide, près de la cité de Delphes. Ce lieu est réputé pour être l’une des deux résidences du dieu Apollon et des neuf muses olympiennes, filles de Zeus et Mnémosyne. Ce changement taxonomique permettra en outre au 19ème siècle de décrire les espèces de papillons comparables qui habitent notamment en Asie centrale, dans l’Himalaya, en Amérique du nord, en Sibérie ou encore en Mandchourie. On estime dans le monde qu’il existe entre 38 et 54 espèces de Parnassius selon les sources officielles les plus récentes (rapport des lépidoptéristes de France de 2005, rapport de l’UNEP de 2006, Catalogue of Life de 2015). Mais ces chiffres sont fortement discutables en raison d’une forte variabilité spécifique donnant lieu à de nombreuses sous-espèces possibles. D’ailleurs c’est une des raisons pour laquelle le papillon Apollon est menacé d’extinction dans plusieurs zones géographiques de l’Eurasie puisque nombre de collectionneurs ont recherché et recherchent encore ces subtilités de couleurs et de motifs pour leurs collections. Les populations situées au nord comme en Scandinavie ont pour exemple tendance à être plus blanches et à avoir des contrastes pigmentaires plus marqués. Dans les Pyrénées et en Espagne, elles tendent au contraire à être plus sobres avec des nuances grises et des ocelles oranges voire jaunes-orangées. Malgré son statut de protection au niveau national et international, l’Apollon reste toujours menacé par d’autres facteurs comme la destruction de ses habitats, le réchauffement climatique, les fauches précoces, l’abandon du pastoralisme ou inversement l’élevage extensif trop intense. Dépendant de plantes hôtes comme les orpins et les joubarbes au stade larvaire et de fleurs aux couleurs généralement violacées comme les chardons, les centaurées et les scabieuses pour son alimentation à l’état d’imago, ce papillon possède de nombreuses exigences écologiques pour perpétuer son cycle de vie. Sa stratégie de reproduction atypique propre à certains genres de lépidoptères, par dépôt d’une enveloppe rigide faite de chitine appelée sphragis sur l’appareil génital de la femelle après l’accouplement, lui permettrait d’améliorer ses chances d’accouplement en envoyant un signal fort aux mâles ne s’étant encore pas reproduits pour trouver une autre femelle non fécondée. Grâce à ses ocelles rouge ou orange vives, l’Apollon peut également compter sur son aposématisme pour dissuader de potentiels prédateurs. Renfermant possiblement dans ses ailes des glycosides cyanogènes provenant notamment de certaines crassulacées, il apparaît comme une source éventuelle d’empoisonnement. À l’état de chenille, l’Apollon est en mesure d'envoyer aussi par le biais de son osmeterium, un organe charnu bifide orangé placé sur la tête, une odeur nauséabonde s'il se sent menacé. Ces moyens de défense et de contrôle sexuel ne sont pas sans rappeler les attributs et attitudes d’un certain dieu grec cité avant qui, pour combattre ses adversaires, n’hésitait pas à se servir de son arc en tirant des flèches ou bien à répandre la peste, et qui pour s’adjuger des nymphes et princesses faisait usage de nombreux stratagèmes et châtiments !

Rosalie, Rosalie, pauvre de moi... tous les jours je pense à toi !

Rosalia alpina, Pyrénées centrales (photo Ugo)
Rosalia alpina, Pyrénées centrales (photo Ugo)

Chère Rosalie des Alpes,

Il ne se passe pas un jour où je ne pense point à toi. Notre rencontre fut un grand moment de bonheur et pour cause je te cherchais éperdument depuis de longues années. J’avais entendu dire que tu habitais les zones boisées en montagne là où de vieux hêtres finissent paisiblement leurs jours. Et pourtant, malgré mes nombreuses prospections menées loin des sentiers battus, je ne parvenais pas à te trouver et le temps commençait à se faire long ; jusqu’à cet instant où tu t’es posée là, subitement, sur une simple casquette de couleur sombre réchauffée par le puissant soleil de Juillet, dans un moment où je ne m’y attendais absolument pas. La nature réserve toujours des surprises mais ton apparition soudaine resta durant quelques secondes ce qui semblait être un mirage. La vision de tes élytres duveteuses bleu-cendré maculées de tâches noir d’encre veloutées ne pouvait relever d’un quelque onirisme. J’avais enfin devant moi la preuve tant attendue de ton existence. Perdu dans mes pensées, je suivais le mouvement dansant de tes longues et sublimes antennes segmentées dans la douce brise venant de la vallée. Tes pattes se déplaçaient avec extension et rythme comme dans un cha-cha-cha maîtrisé où j’aurais voulu pouvoir t’accompagner. Bien que tes mandibules luisantes m’auraient certainement impressionné, je sais qu’elles sont inoffensives et que tu préfères les suintements de sève sucrée aux matières végétales décomposées. À l’heure où je t’écris, tu n’es de toute évidence plus de ce monde, mais ta descendance est peut-être assurée grâce aux nombreux œufs que tu as pu pondre dans le bois mort. Hélas, je suis las de constater que les vieilles forêts d’altitude dans lesquelles tu t’épanouies deviennent de plus en plus rares. Si bien qu'aujourd’hui, ta progéniture est menacée de disparition dans plusieurs pays d’Europe. Fatalité de notre monde qui pourra, je l’espère, enfin aboutir à une prise de conscience, notre rencontre aura au moins pour mérite d’avoir cristallisé à jamais mon engagement pour la protection de la biodiversité.

L'Amiral s'invite au palmarès de l'emblème officiel du Québec.

Limenitis arthemis, Alaska (photo ugo)
Limenitis arthemis, Alaska (photo ugo)

C’est en compagnie du Bouleau jaune, du Harfang des neiges et de l’Iris versicolore, les trois emblèmes officiels de la province canadienne du Québec, que le papillon Limenitis arthemis alias Amiral pourrait bientôt figurer. Avec plus de 25 000 espèces d’insectes recensées dans cette seule région administrative, ce sublime lépidoptère incarne un des symboles forts de cette diversité entomologique présente en Amérique du Nord. Sa reconnaissance officielle en tant qu’insecte emblème n’est toutefois pas encore actée. Pourtant depuis les années 1990, l’Amiral ne cesse de conforter sa place d’animal emblématique dans l’opinion publique. En 1996, il figure notamment dans la liste des candidats retenus par le comité scientifique de la société d’entomologie du Québec aux côtés de la Coccinelle maculée, la Demoiselle bistrée, la Cicindèle à six points et le Bourdon fébrile. En 1998, à la suite d’une exposition organisée par l’Insectarium de Montréal et intitulée « Pourquoi un insecte emblème ? », il remporte avec grand succès un vote populaire en rassemblant près d’un tiers des suffrages ! Grâce à la pugnacité de membres issus du cercle scientifique mais aussi politique, un projet de loi est enfin déposé en 2017 à l’initiative du député Dave Turcotte quelques jours avant la célèbre fête nationale du Québec, la Saint-Jean-Baptiste qui n’oublie généralement pas de rappeler lors de son défilé les emblèmes officiels de la province. Le texte devrait donc être débattu prochainement à l’Assemblée nationale et pourrait déboucher sur une modification de la loi portant sur le drapeau et les emblèmes du Québec entérinée le 5 novembre 1999. En attendant, le suspens est à son comble et chaque québécois peut participer au grand recensement de l’espèce sur le territoire afin de mieux connaître son aire de répartition. À un battement d’aile de devenir emblème officiel, le choix de l’Amiral s’avère surtout être un message fort en direction de la protection de la biodiversité. En cas de disparition de ce fabuleux insecte, c’est possiblement tout un écosystème qui pourrait être victime d’un « effet papillon ».

D'où vient la curieuse réputation du Dectique verrucivore ?

Dectique verrucivore, Pyrénées (photo ugo)
Dectique verrucivore, Pyrénées (photo ugo)

Orthoptère inféodé aux pelouses de montagne, landes et prairies sèches bien exposées au soleil ; le Dectique verrucivore fait partie du quotidien estival des habitants de la campagne. On raconte d’ailleurs qu’en dehors de ses stridulations diurnes qui animent la vie des alpages, cette sauterelle aurait également le pouvoir de rendre de petits services à la population locale. Le nom de l’espèce "verrucivorus" confirme en tout cas la tradition selon laquelle cet orthoptère aurait été utilisé autrefois pour traiter les verrues. Mais qu’en est-il réellement de cette pratique ancestrale ? Est-elle vraiment fondée ? Et où trouve-t-elle ses origines ? C’est le naturaliste Linné qui nomma tout d’abord l’espèce Gryllus verrucivorus en 1758 à la suite d'un voyage qu’il fit en Laponie. Cet insecte est alors appelé par des paysans suédois Stora Vârtbitare. Ils auraient expliqué et montré au célèbre scientifique que ces sauterelles permettaient de soigner des verrues localisées notamment sur les mains. Pour ce faire, ils tenaient sans doute l’animal entre leurs doigts et l’approchaient de la zone à traiter. Par le biais d’une légère pression, l’insecte se défendait certainement en mordant la peau et en exsudant également un liquide brun et acide aux propriétés caustiques. Selon John Himmelman, dans son livre Cricket Radio de 2011, une petite verrue pouvait disparaître avec seulement quelques morsures. Pour une excroissance ou une lésion plus large, cela constituait un vrai challenge ; non pas pour l’insecte qui aurait probablement fait le travail mais pour la personne qui devait endurer ce traitement peu plaisant. Bien que ces informations consolident l’origine de cette pratique ancestrale, il reste tout de même des incertitudes alimentées par plusieurs controverses. Dans son livre intitulé Fauna entomologica scandinavica de 1986, le norvégien Knud Th. Holst affirme que Linné observa des paysans du centre de la Suède utiliser ces sauterelles pour mordre un autre type de lésions cutanées, les phlyctènes, autrement dit les ampoules. Cette technique naturelle permettait alors de crever ces gonflements douloureux, d’en extraire la lymphe et de sécher le derme à l’aide des sucs gastriques émis par l'insecte orthoptère. Plus généralement, nous pourrions également nous poser la question sur l’origine de l'appellation suédoise Stora Vârtbitare, qui signifie littéralement grand croqueur de verrue. Y’avait-il d’autres sauterelles utilisées pour ce type de pratique en Suède ? Pourquoi Linné aurait choisi le qualificatif verrucivorus alors que la technique employée permettait plutôt de soigner les ampoules ? Autant de questions qui laisseront la réputation du Dectique verrucivore remplie de mystères et d'imprécisions. 

La zygène : un papillon de nuit aux couleurs aposématiques.

Zygène de la Spirée, Vosges (photo Ugo)
Zygène de la Spirée, Vosges (photo Ugo)

Dans le cercle restreint des papillons de nuit vivant à la lumière du jour se dévoile une espèce de lépidoptère tout à fait singulière appelée  la Zygène de la filipendule. Insecte de taille plutôt modeste, cet hétérocère diurne aux antennes robustes en forme de joug affiche ostensiblement sur ses délicates ailes chatoyantes des couleurs rouges vives ne laissant guère indifférents d’éventuels prédateurs qui seraient tentés de le consommer. En envoyant un signal d’alarme visuel, la Zygène de la filipendule indique à ses potentiels agresseurs qu’ils courent un danger d’empoisonnement en cas d’attaque et d’ingestion. Ce type de stratégie défensive connue sous le nom d’aposématisme est pratiqué par de nombreux êtres vivants dans le monde. A l’image du célèbre papillon monarque et d’autres espèces animales comme la salamandre tachetée ou le serpent corail, le port de couleurs et de motifs dissuasifs est un atout majeur pour assurer la survie d’une espèce dans son environnement. Ce mécanisme de défense doit toutefois être interprété avec dichotomie car nombre d’animaux aux couleurs aposématiques ne sont pas du tout toxiques. Les naturalistes ont ainsi établi deux catégories d’espèces dites aposématiques, celles qui adoptent un mimétisme de type müllerien avec un codage spécifique plus ou moins homogène et qui sécrètent des substances toxiques bien réelles, et enfin celles qui leurrent leurs prédateurs par une simple imitation d’espèces aposématiques nocives en employant un mimétisme dit bathésien. Produisant du cyanure et des alcaloïdes puissants à partir de composés végétaux synthétisés au stade larvaire, la Zygène de la filipendule s’inscrit bien comme une espèce aposématique vraie. Avec un statut clairement identifié au sein de la chaîne trophique et en l’absence de stress écologiques, ce joli lépidoptère ne devrait donc pas disparaître trop vite de nos prairies fleuries !

Le Carabe doré, un excellent compagnon pour le jardinier.

Carabe doré, massif central (photo ugo)
Carabe doré, massif central (photo ugo)

Si vous croisez un jour sur votre passage un sublime coléoptère à carapace de couleur verte métallique rayée de bandes dorées et dont le mode de déplacement évoque celui d'un insecte pressé avançant sur le sol de manière déterminée, il y'a de grandes chances pour que vous ayez affaire à sa majesté le grand Carabe doré ! Pourvu de grandes antennes sensibles aux vibrations et de solides mandibules affûtées prêtes à dépecer, cet insecte carnivore aux longues pattes articulées offre tous les atouts d'un redoutable chasseur utilisant détection et sens de l'exploration pour traquer ses proies sans relâche jusqu'à temps de les débusquer. S'attaquant avec voracité à des limaces, des escargots, des chenilles, des vers, des larves mais aussi à des insectes comme les doryphores ou les carpocapses, le Carabe doré permet de contrôler les populations de plusieurs animaux "nuisibles" vivant dans nos vergers et nos jardins. Véritable moyen de lutte biologique naturelle contre les ravageurs, cet insecte joue un rôle d'auxiliaire fondamental dans les agro-écosystèmes d'Europe centrale et occidentale.  D'après des études conduites par l'INRA en France et la BBSRC (Biotechnology and Biological Sciences Research Council) au Royaume-Uni, ce coléoptère pourrait même avoir une action vertueuse pour stopper le développement des plantes adventices et rudérales jugées indésirables en consommant leurs graines. Les services écosystémiques rendus par cet insecte au profit d'une agriculture vivrière responsable apportent un autre regard sur les méthodes de lutte actuelles et pourrait remettre ainsi la biodiversité au cœur des politiques d'aménagement et de développement agricole de notre société en quête d'un modèle plus durable. 

A la recherche du fragile Criquet ensanglanté.

Stethophyma grossum (photo ugo)
Stethophyma grossum (photo ugo)

Dans un monde où la nature disparaît rapidement au profit des activités humaines, il devient de plus en plus difficile de retrouver les rescapés de ce grand naufrage biologique actuel. Parmi les nombreux avis de recherche lancés par les détectives et justiciers de la faune sauvage, apparaît celui du criquet ensanglanté, Stethophyma grossum. Cet orthoptère de la famille des Acrididés devient de plus en plus difficile à observer sur notre territoire national si bien qu'il aurait déjà disparu d'une partie du sud ouest de la France. Insecte inféodé aux zones humides permanentes et ensoleillées, le Criquet ensanglanté a souffert du drainage et des nombreux aménagements entrepris sur son espace de vie. Ses conditions de reproduction sont contraignantes puisque ses œufs doivent être constamment plongés dans une atmosphère humide et lumineuse afin de favoriser le développement futur de ses larves. La femelle du Criquet ensanglanté présente un dimorphisme sexuel caractéristique, c'est d'ailleurs grâce à ça que l'on peut la reconnaître facilement. Sa grande taille allant de 25 à 40 millimètres de longueur et ses fréquentes couleurs rouge sanguines réparties sur les fémurs, les tibias, la tête, le thorax et une partie de l'abdomen permettent une identification simple et rapide. Mais la tâche n'est souvent pas rendue aisée en raison d'un fort mimétisme dans les végétations hygrophiles denses, et bien souvent, seul le chant du criquet nous permet d'être informé de sa présence. C'est donc en évoluant dans un cadre de discrétion et de disparition de l'espèce que les scientifiques doivent tenter d'estimer l'état des populations. Autant dire que ce défi s'annonce compliqué et qu'il semble annoncer une mise en péril globale de la biodiversité sur des temps relativement courts.

Confessions d'une Mante religieuse.

Mante religieuse, Alsace (photo Ugo)
Mante religieuse, Alsace (photo Ugo)

Insecte ptérygote élancé pourvu de longues pattes articulées , la Mante religieuse impressionne toujours les promeneurs marchant en terrains vagues et près secs ensoleillés. Stimulant notre imaginaire depuis des siècles, cet arthropode a hérité de nombreuses croyances dont certaines relèvent quelquefois de la simple hyperbole. Mais qu'en est-il réellement de cet insecte majestueux à la grâce de danseuse contorsionniste ? L'origine du nom de la Mante religieuse provient du mot grec "mantis" qui signifie littéralement le prophète. La position que prend l'insecte au repos en repliant ses pattes antérieures rappelle celle d'un fidèle au moment de la prière. Ce moment "spirituel" n'est en réalité qu'une posture de chasse stratégique combinant mimétisme et affût. Avec une rotation de la tête à 180 degrés et de grands yeux composés d'ommatidies très développées, la Mante religieuse se présente comme un prédateur doté d'une excellente perception visuelle. Des capteurs sensibles lui permettent également de réagir efficacement aux vibrations dans l'air. A l'aide de ses pattes antérieures, l'insecte capture ses proies rapidement et dévore ensuite leurs ganglions cérébraux afin de les immobiliser. Seuls les pattes et les ailes ne seront pas ingérés durant le repas. Les autres parties seront découpées par des pièces buccales puissantes. La Mante femelle possède par ailleurs la réputation de manger son conjoint au moment de la reproduction. Ce cas isolé de "cannibalisme' dans la nature reste en réalité peu fréquent et totalement inexpliqué. Même décapité, le mâle continue à transmettre ses spermatozoïdes. Cette interrogation du vivant nous invite à beaucoup d'humilité et l'anthropocentrisme doit ici être écarté pour comprendre les mœurs d'un insecte qui fascine tant par son agressivité que par sa dextérité. 

Mi papillon mi libellule, qui suis-je ? L'ascalaphe !

Ascalaphe soufré, Alsace (photo ugo)
Ascalaphe soufré, Alsace (photo ugo)

Curieux insecte ailé aux couleurs chatoyantes, l'ascalaphe présente des traits morphologiques situés à mi chemin entre les lépidoptères et les odonates. Les scientifiques ont d'ailleurs dénommé le genre de l'espèce, Libelloides, en raison de sa ressemblance avec les libellules, notamment lorsque celle-ci vole ou ferme ses ailes au repos. Appartenant en fait à l'ordre des neuroptères, l'ascalaphe se différencie des autres genres d'insectes dans la mesure où il présente des nervures saillantes sur des ailes membraneuses jaunes en partie transparentes, une tête plus large que le thorax, un corps allongé recouvert de poils noirs et des antennes finissant en massue. Nous comprenons aussi pourquoi il est facile de faire l'amalgamme avec un papillon de jour lambda. L'ascalaphe est un insecte thermophile qui apprécie les milieux secs et herbacés très ensoleillés. Il n'hésite pas à s'exposer pendant des heures au soleil et s'envole parfois pour trouver un partenaire ou capturer des proies comme des mouches ou autres petits insectes volants. Avec un comportement de prédateur et un faciès de séducteur, l'ascalaphe s'inscrit bien dans une catégorie transversale mais aussi unique.